Articles

Anatomie d'une chute - Maltraitance en Ehpad

Image
  Mon papa est décédé le 6 juin 2023 à 9h30 du matin. Il est entré en Ehpad début mars 2022, un établissement à proximité du domicile de ma maman, à sept kilomètres seulement, afin qu’elle puisse lui rendre visite chaque jour. Car non, on ne "place" pas une personne âgée : on la  déplace , et ce déplacement est une déchirure. Il s’opère toujours d’un lieu familier, intime, vers un espace étranger, souvent froid — à l’image de la représentation que nous nous faisons de la mort. Ce geste, pourtant souvent nécessaire, n’en est pas moins un crève-cœur. Institutionnaliser un être cher, c’est s’avouer vaincu, reconnaître l’épuisement, tout en se convainquant que c’est "pour son bien". Mais quelle violence silencieuse... Et puis, ce mot,  aidant … je le rejette. Il est technocratique, administratif, désincarné. Mon père n’avait pas un aidant : il avait une épouse aimante. Je n’étais pas son aidant : j’étais son fils, son sang, son prolongement. Ce terme-là,  aidant , neutr...

L’exclusion et la maltraitance des personnes âgées dépendantes : Une analyse à la lumière de Canguilhem et de Foucault

Image
  En écoutant la soutenance de thèse de Juliette Speranza sur "Normes scolaires et neurodiversité : Déconstruire un modèle ségrégatif vers une pédagogie prudentielle », je me suis rendu compte de l'universalité du concept qui va bien au delà de la neuro-diversité des enfants et des jeunes adultes. C'est toute la sphère de ce que moi j'appelle "la fragilité" qui est concernée. L’exclusion des personnes âgées dépendantes dans notre société moderne peut être analysée à travers les thèses de Georges Canguilhem sur la "norme et le pathologique", ainsi que celles de Michel Foucault sur la "norme sociale et l’incarcération". Ces perspectives permettent de comprendre comment les normes sociales façonnent la perception et le traitement des individus qui dévient de ces normes, notamment les personnes âgées dépendantes et les enfants handicapés ou autistes. Une analogie pertinente peut également être faite entre la maltraitance des personnes âgé...

Egdard Morin, à presque 103 ans, il reste un phare de l'humanisme à la française

Image
  Mon parcours a été profondément influencé par la rencontre avec des figures intellectuelles majeures, parmi lesquelles Edgar Morin occupe une place spéciale. C’est dans les années 80, à Paris, lors de conférences organisées par la gauche de l’époque, que j’ai eu la chance de le rencontrer. À cette époque, je fréquentais l’Université de Nanterre, et c’est au sein de ce bouillonnement intellectuel que j’ai eu l’occasion de croiser des penseurs comme Cornelius Castoriadis, un ami proche de Morin, et Marcel Lefort. Ces rencontres ont façonné ma vision du monde et mon engagement politique. Cornelius Castoriadis, qui est devenu pour moi un véritable mentor, partageait avec Morin une profonde sagesse et une humanité sincère. Leur proximité intellectuelle et personnelle m’a souvent rendu difficile la tâche de les différencier, tant ils étaient semblables dans leur sympathie et leur capacité à comprendre et à expliquer la complexité du monde. Leur influence combinée a été déterminante dan...

Le Ker Monge : Le mariage de la Bourgogne et de la Réunion.

Image
  J’ai eu l’idée de créer en 2018 un nouveau produit typiquement réunionnais : "la crème de goyavier". Le goyavier, fruit emblématique de l'Île de La Réunion 🇷🇪, est pourtant souvent considéré à tort comme une peste végétale. Originaire du Brésil 🇧🇷 et introduit sur l’île au début du XIXe siècle, ce fruit sucré et acidulé fait partie du patrimoine gustatif réunionnais. Nombreux sont ceux qui se souviennent de promenades dans les hauteurs de l’île, à cueillir ces petits fruits rouges. C’est en pensant à ces moments que j’ai décidé de lancer une crème de goyavier, à l’image de la célèbre crème de cassis de Bourgogne. Pour développer la recette, j’ai demandé à la Ferme FruiRouge de Concœur, Nuits-Saint-Georges de m'élaborer la meilleure recette en s'inspirant de leur merveilleux travail sur la crème de Cassis. La marque "Crème de Goyavier" est désormais déposée et je vise une Indication Géographique Protégée (IGP) à terme pour garantir une fabrication l...

Île de la Réunion : La clinique de Saint-Benoît : un regard nuancé.

Image
  Dans les années 1960, La Réunion était confrontée à une situation socio-économique désastreuse : une population en forte croissance, un taux de natalité élevé, une pauvreté généralisée et un manque criant de soins de santé. C’est dans ce contexte que se trouve l’histoire de la clinique de Saint-Benoît , dirigée par le docteur Moreau, et les controverses liées aux stérilisations forcées de milliers de femmes réunionnaises. Plutôt que de se limiter à une vision binaire où les victimes seraient d’un côté et les oppresseurs de l’autre, une approche de confluence , concept que j’ai développé, permet de saisir la complexité de cette affaire. Cela implique d’examiner l’ensemble des motivations, des actions, et des conséquences, en évitant les jugements simplistes ou anachroniques. Contexte démographique et sanitaire Dans les années 1960, la situation des femmes à La Réunion était particulièrement difficile. En moyenne, une femme réunionnaise avait 6 à 7 enfants , ce qui, dans un co...